Tempus muliebre

Un âge de femme

Spectacle musical pour voix de femmes et cordes pincées

Dialogue d’une part littéraire entre des lettres d’Hildegard von Bingen et des poèmes et lettres contemporains de femmes iranienne et afghanes et d’autre part musical avec, dans un même espace-temps, des extraits de chants médiévaux et des compositions de Gualtiero Dazzi.

DOSSIER DE PRESENTATION

Avec l’ensemble Discantus, direction : Brigitte Lesne

« Cette époque est un âge de femme » ( « Istud tempus tempus muliebre est »), écrivait Hildegard von Bingen aux prélats de Mayence. Connue pour ses visions et ses compositions, cette moniale du 12e siècle, fondatrice de deux monastères, porte en son nom le combat (signification de la racine germanique « hild ») qu’elle a mené sa vie durant contre l’injustice et la corruption, comme en attestent ses lettres, nombreuses et audacieuses, qu’elle adresse aux grands de son temps. À l’archevêque de Mayence, elle n’hésite pas à conclure sa lettre en ces termes : « En résumé : vos propos outrageants, injurieux et menaçants n’ont pas à être écoutés. Les châtiments que votre orgueil brandit ne servent pas Dieu mais les présomptions débridées de votre volonté éhontée. » Elle met en garde l’évêque de Prague contre ses errements et ses égarements, elle conjure le Pape Eugène de ne pas se « lasser sur le droit chemin », elle reproche à Conrad, Roi des romains, son goût pour le «  plaisir du pouvoir  » et aux prélats de Mayence leur « désir de vengeance ». Toute sa correspondance se trouve ainsi scandée par l’insoumission et la subversion, témoignant d’une liberté étonnante – à nulle autre pareille.

« Cette époque est un âge de femme », écrivait en 1178 celle qui se disait pourtant « plus que misérable dans [s]a condition de femme », dans une lettre à Bernard de Clairvaux. Quelques huit cents ans plus tard, dénonçant « les démons du mensonge, de la honte et de l’hypocrisie  », Forough Farrokhzad, poète iranienne, fait éclore à son tour « la révolte profonde de tous les temps » : « je voulais être le cri de ma propre existence, mais hélas je n’étais qu’une femme. » Non loin de là, des femmes afghanes, Nâdiâ Anjuman, Nafissa Azhar, Sedâ Soltani et Zahrâ Moussavi, « rejetée[s] du monde, niée[s] », font entendre au prix de leur vie « la souffrance des femmes encagées », et se mettent à chanter « même la gorge écrasée sous le joug de leur bottes / même la bouche en sang sous les coups de leurs poings ». 

« Cette époque est un âge de femme » : aux lettres en latin d’Hildegard von Bingen viennent répondre par-delà le temps les poèmes en persan dari de ces femmes iraniennes et afghanes. Et toutes se tiennent là, « debout[s] et ferme[s] et fière[s] / sans peur de leurs ténèbres ».

Musiciens : 
Sandrine Chatron, harpe 
Florentino Calvo, mandoline et instruments traditionnels
Jean-Marc Zvellenreuther, guitare

Brigitte Lesne, direction, voix (parlée), harpe médiévale
Cécile Banquey, Christel Boiron, Maud Haering, Catherine Sergent : voix (chantées)

Le collectif d’écritures Comme une présence :
Gualtiero Dazzi, compositeur
Elisabeth Kaess, livret et dramaturgie

Avec le soutien de l’Académie des beaux-arts